Guinée
D’un côté le pouvoir qui tient mordicus à réviser la constitution. De l’autre, l’opposition qui s’obstine à faire barrage au projet. En Guinée, à mesure qu’approchent les joutes électorales (référendum, législatives et présidentielle), la tension déjà vive depuis des mois est loin de retomber.
Une surprise aux allures d’une embuscade militaire. Si Alpha Condé n’a jamais été soldat, il s’est néanmoins servi de la technique pour prendre son peuple de court. Lequel peuple est convoqué aux urnes le 1er mars prochain pour les législatives alors que ce scrutin était prévu le 16 février.
Le décret présidentiel rendu public hier et signé mardi soir annonce également que ce scrutin législatif sera couplé au référendum constitutionnel. Concrètement, après avoir glissé dans l’urne le bulletin de celui qu’il voudra comme député de sa circonscription, chaque électeur guinéen aura à choisir entre deux bulletins : le blanc, pour le « OUI » à la réforme constitutionnelle et rouge pour le « NON ».
Et ce ne sont pas des arguments qui font défaut au camp d’Alpha Condé pour justifier une telle option. « Sur le plan économique, ça va coûter moins cher et ça va faciliter la mobilisation des militants. On n’a pas deux campagnes à faire. On mobilise les militants pour deux scrutins en même temps », s’est justifié Papa Koly Kourouma, directeur de campagne de la majorité présidentielle cité par RFI.
« Les gens sont libres de leur choix. C’est pourquoi d’ailleurs, on dit “coupler”. Ce ne sont pas les mêmes élections, ce sont des urnes différentes. Donc chacun a le choix d’aller ou de ne pas aller », a-t-il ajouté.
Le chaos aux portes de la Guinée ?
Mais insuffisant pour convaincre l’opposition qui y voit un stratagème pour le pouvoir de forcer les Guinéens au référendum constitutionnel. Forcer, car l’opposition n’en veut pas parce qu’elle soupçonne le « Mandela de l’Afrique de l’Ouest » (Alpha Condé s‘était surnommé ainsi à sa sortie de prison en 2001) de briguer un troisième mandat consécutif.
Ce qu’interdit formellement la constitution de 2010 en vigueur, même si l’avant-projet du nouvel acte fondamental limite lui aussi à deux le nombre de mandats présidentiels.
Déterminée à faire échec à ce référendum, l’opposition qui accuse le président Condé de dérive « dictatoriale » et soutenue par une bonne partie de la société civile, est depuis quelque trois mois dans la rue. Non sans perdre des âmes dans des heurts avec les forces de sécurité. Au moins 28 civils et un gendarme ont été tués depuis mi-octobre dernier, d’après des estimations rapportées par l’AFP.
De là à craindre que la situation s’envenime davantage dans les jours à venir. Tant l’ostensible jusqu’au boutisme des deux camps semble ignorer les appels à la retenue et au dialogue de religieux catholiques. Ce, malgré les dangers tant redoutés par des observateurs. Et c’est de cette manière que la plupart des pays du continent se garantissent des chaos sociopolitiques surpassant parfois leurs propres auteurs.
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